Dans le département du Noun, à l’Ouest du Cameroun, un jeune homme de 35 ans, Tata Bakari, est à la tête d’une exploitation agricole de plus de 60 hectares. Son histoire, digne d’un conte de fées moderne, est celle d’un enfant de la rue qui a transformé sa passion pour l’agriculture en une véritable success story.
Une enfance difficile, une passion salvatrice
Comme de nombreux jeunes de son âge, l’enfance de Tata Bakari n’a pas été facile. Livré à lui-même dans les rues de Foumbot en provenance d’une famille très pauvre à Kumbo, il a connu les vices et le banditisme. Pourtant, au milieu de cette adversité, une passion va naître et changer son destin : l’agriculture. Dès 1999, à l’âge de 8 ans, il se lance dans la culture du maïs, une activité qui deviendra sa bouée de sauvetage.
Pendant 7 ans, Tata Bakari se forme dans l’agriculture auprès d’experts internationaux ingénieurs agronomes de l’Institut de la Recherche agricole pour le Développement. Puis à l’occasion d’une opportunité offerte par un particulier en 2007, il quitte Foumbot pour Yaoundé, la capitale.
Il travaille comme ouvrier agricole dans des exploitations de maïs, de gingembre, de cacao et de banane plantain. “J’ai produit 50 hectares de maïs et 40 hectares de gingembre en deux ans”, raconte-t-il, témoignant de son engagement et de sa détermination.
De cette expérience de courte durée, Tata Bakari décide de s’installer à son propre compte en 2009 et acquiert un hectare de terrain pour démarrer sa propre production de maïs. Sept ans plus tard, en 2016, son exploitation s’étend sur 8 hectares, preuve de sa capacité à développer son entreprise.
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Une reconnaissance nationale et internationale
Le travail acharné de Tata Bakari est reconnu par ses pairs. En 2016, il est sacré “Meilleur jeune entrepreneur agricole du développement du Noun“ lors de la 3ᵉ édition de la caravane de promotion et valorisation des métiers agro-pastoraux. Il reçoit également un “Awards d’excellence des Transformateurs internationaux”, une distinction qui souligne son engagement dans le secteur agricole.
« J’ai demandé l’audience à la Présidence plusieurs fois et je ne l’ai pas obtenue. Je croyais qu’un enfant de la rue ne peut pas être félicité par le Chef de l’Etat. Aujourd’hui, j’en suis satisfait et c’est pour cela que je vais me mettre encore plus au travail », confie le Tata Bakari d’une voie pleine d’émotions.
Un modèle de reconversion pour les enfants de la rue
Au-delà de son succès personnel, Tata Bakari se veut un modèle de reconversion pour les enfants de la rue. Conscient des difficultés que rencontrent ces jeunes, il a mis sur pied le programme JAF (Jeunes Agriculteurs de Foumbot), un projet d’accompagnement visant à former et à installer 1 500 jeunes enfants de la rue, qui à leur tour en formeront 1 500 autres.
« Nous avons besoin de financement pour aller dans les rues, récupérer les jeunes, discuter avec eux, les encadrer, les former, les installer, c’est ça le plus important », explique Tata Bakari.
Depuis le lancement officiel de ce projet qui lui tient à cœur en 2015, il a formé gratuitement à ce jour 460 jeunes d’origines diverses et encadré 680 stagiaires, dont plusieurs ont réussi à s’établir à leur propre compte. Dans sa plantation, il emploie et forme actuellement 25 jeunes, contribuant ainsi à lutter contre le chômage et la pauvreté.
Ce qui lui valu également de nombreux soutiens, notamment un financement de 4 millions FCFA issu du Plan triennal spécial jeune prescrit par le chef de l’Etat et exécuté par le ministère de la Jeunesse et de l’Éducation civique.
Adepte de la diversification des cultures
Si le maïs reste sa culture de prédilection, Tata Bakari ne s’y limite pas. Il diversifie ses activités et exploite aujourd’hui plusieurs hectares de bananes plantains, haricots, riz pluvial et niébé.
Il s’investit également dans le greffage des arbres fruitiers, une activité qui lui permet d’améliorer la qualité et la rentabilité de ses productions. Le jeune agriculteur possède notamment plusieurs pépinières à travers lesquelles il fournit les plants et forme les enfants de la rue et déplacés internes.
« Moi, je reste serein et continue de penser que les enfants de la rue, qui ne savent pas écrire ni lire, sont les opérateurs économiques de la République du Cameroun et les opérateurs économiques de l’Afrique. (…) Je serai au Congo à Kinshasa, je serai au Gabon, je serai dans tous les pays africains pour rencontrer les ministres qui sont en charge de l’agriculture », promets Tata Bakari au micro de la CRTV.
Il incarne ainsi un modèle de résilience et d’entrepreneuriat agricole réussi, prouvant qu’il est possible de transformer une vie difficile en une success story, avec de la détermination et du travail acharné. Son histoire est une source d’inspiration pour tous les jeunes Camerounais qui rêvent d’un avenir meilleur.